Roule & Co réagit aux propos du Dr Mercier Guyon, président de la Prévention Routière 74, tenus lors de la conférence de presse du mardi 7 juin à la mairie d’Annecy, relative à la place du cycliste dans l’espace urbain et préambule à la nouvelle campagne de communication d’Annecy « le code de la route, c’est aussi pour les cyclistes ».
Roule & Co regrette d’ailleurs de ne pas avoir été officiellement invité à cette conférence de presse pour évoquer un sujet qui est au cœur de ses préoccupations.
La conférence de presse a été relayé par le Dauphiné Libéré du 2 juin : Article DL – 02juin16
Bref rappel historique : depuis les Trente Glorieuses la voiture est devenue reine en France. La conséquence a été clairement énoncée par Georges Pompidou en 1971 : « il faut adapter la ville à la voiture ». Aussi dit, aussitôt fait. La voiture est aujourd’hui pour une grande majorité le moyen normal de déplacement urbain. Le vélo, très répandu au lendemain de la seconde guerre mondiale, a progressivement perdu sa place.
Depuis, tout le monde s’est aperçu des inconvénients liés à la solution du tout-voiture : bruit, pollution, embouteillages, occupation de l’espace au sol, insécurité routière. Mais le mal est fait. Un retour en arrière s’amorce plus ou moins franchement. Il mettra beaucoup de temps à porter ses fruits.
En conséquence, les aménagements cyclables cherchent souvent leur place. On les retrouve disséminés, sur les chaussées mais aussi les trottoirs. Car l’espace urbain est limité et il ne faudrait quand même pas gêner la voiture…
Les cyclistes aussi cherchent leur place, même si un petit vélo peint sur la chaussée leur donne parfois un indice. Mais voilà, le flot de pare-chocs les frôlant, les portières s’ouvrant devant eux, les queues de poisson répétées, les voitures stationnées « pour 2 minutes » sur les bandes cyclables incitent les moins téméraires à emprunter les trottoirs. D’ailleurs beaucoup de cyclistes ne savent même pas que les trottoirs leur sont interdits.
Certes, des comportements inacceptables de la part de certains cyclistes existent, notamment le non-respect des priorités, de l’espace qui leur est autorisé et la non-prise en compte des autres usagers.
Ces comportements se retrouvent également chez les piétons ou les automobilistes. D’ailleurs les cyclistes ont souvent leur permis de conduire et se déplacent à pieds une fois leur voiture ou leur vélo garé. La subtile différence est que quand on est automobiliste, on est maître d’un objet de 1500 kg évoluant à 50 km/h.
En termes d’insécurité routière, environ 150 cyclistes perdent la vie chaque année. 150 de trop. 2 fois sur 3 l’accident a lieu sur une route de campagne. Le nombre de cyclistes urbains tués reste donc faible comparé à leur fragilité.
Annecy, comme toute autre ville, doit être principalement un lieu de vie. Les déplacements sont indispensables mais doivent avoir le moins d’impact possible sur la qualité de vie.
La solution passe entre autres par l’augmentation du nombre de déplacements à vélo. Quand le vélo sera reconnu comme un moyen de transport à part entière, quand les cyclistes seront 5 ou 10 fois plus nombreux, alors ils seront respectés par les autres usagers, se sentiront en sécurité et prendront leur place sur la route.
Le chemin pour parvenir à cet objectif est énorme. Il passe beaucoup par la communication, l’incitation, la découverte :
• Auprès des cyclistes actuels pour leur rappeler quelques règles et aussi leur donner des conseils de terrain pour rouler en meilleure sécurité : prendre en compte les angles morts, anticiper le comportement des autres, se faire voir et vérifier qu’on est vu, etc…
• Auprès des autres pour les inciter à passer au vélo : auprès des enfants, auprès des actifs et des retraités, auprès des femmes, des hommes, de toutes les catégories sociales, des habitants des hyper centres et des banlieues. Le vélo est pour tout le monde. Cette action serait en parfaite adéquation avec l’objectif de la C2A de tripler la part modale du vélo d’ici 2030.
Le travail à faire auprès des enfants est primordial car les habitudes de mobilité se prennent très tôt. Parents, accompagnez vos enfants à l’école à vélo ou à pieds ! Apprenez-leur que pour faire 800 m la voiture n’est pas indispensable ! On apprend aux enfants à nager durant leur cycle scolaire, pourquoi ne leur apprend-on pas à se déplacer sur la terre ferme. Exigez des cycles d’apprentissage de la mobilité, de la maîtrise du vélo, de la rue ! Vos enfants vous remercierons dans quelques années.
Un enfant qui aura été charrié dans une voiture toute son enfance pour aller à l’école gardera ce moyen de transport une fois adulte. Il n’aura jamais acquis la perception de la présence d’usagers fragiles. L’insécurité routière ne diminuera donc jamais.
Nous tenons à réagir plus particulièrement aux propos du Dr Mercier Guyon quant aux cyclistes « militants imbéciles ». Un papa ou une maman amenant ses enfants à l’école dans une remorque n’est pas un cycliste « militant imbécile ». C’est juste un papa ou une maman qui amène ses enfants à l’école. Et il prend son vélo car c’est plus rapide, plus pratique à garer, et surtout suffisant pour un si cours trajet.
Roule & Co milite pour la promotion du vélo comme moyen de déplacement. Nous trouvons que militer pour moins de bruit, moins de pollution, des citoyens en meilleure santé, moins de dépenses d’infrastructures n’est pas vraiment imbécile.
Roule & Co agit et communique déjà aujourd’hui, souhaite le faire encore plus demain et se déclare prêt à collaborer avec les mairies et la C2A pour donner un coup d’accélérateur à leur politique cyclable, notamment en menant des actions de promotion du vélo auprès des citoyens.
Donnons au cycliste beaucoup plus de place dans l’espace urbain ! Tout le monde y gagnerait.